J29 – Sur la mer d’Alboran
12 February 2007 | 18:56
En route au 45 a 8 noeuds
Ouf, apres une nouvelle journee d’immobilisation technique, nous voila repartis en direction de Marseille. Notre derniere escale ne fut pas de tout repos. Apres quelques negociations pour pouvoir rentrer dans le port, nous decouvrons les barres d’immeubles, la marina kitch et la fievre du samedi soir de Torremolinos. Puis hier, la grande activite fut le demontage puis le remontage integral de notre grand voile pour pouvoir l’emmener chez un maitre voilier lui coudre une petite piece sur la chute. Cela n’est pas une mince affaire, la voile est lourde et encombrante meme a quatre, et il y a bon nombre de manoeuvres a degreer pour pouvoir l’enlever du mat. Enfin, avec l’envoi de la voile de cape, cela fait une nouvelle manoeuvre que nous aurons apprise. Et hier soir apres un repas rapide, nos etions prets a reprendre la mer et retrouver le rythme des quarts.
Depuis le passage du detroit, c’est sur un nouveau terrain de jeu que nous evoluons. Pour l’instant, il s’appelle mer d’Alboran (Pourquoi Alboran ? Je ne veux pas concurencer le Schmilblick mais si quelqu’un a l’explication de ce nom, il gagne un mini-carembar a venir chercher a bord !). La transat est faite, nous avons perdu ce pincement d’inconnu qui nous a accompagne pendant 25 jours, ce sentiment permanent de decouvrir une nouvelle facette de la navigation, une nouvelle forme de voyage, un nouvel univers d’aventure collective. Nous retrouvons maintenant un type de croisiere que nous connaissons d’avantage. Mais la navigation n’en n’est pas moins belle, et mon quart de ce matin restera un beau souvenir de cette traversee.
La mediterranee n’est jamais a court de surprises, et pour feter la reprise de notre navigation, elle nous a prepare un petit vent dont elle a le secret. Il leve rapidemant une mer tres courte, mais aujourd’hui nous sommes au grand largue. Je prends la barre pour profiter des vagues, et le bateau se met a nouveau a glisser en douceur. 16.9 noeuds, ce matin pour une fois je parviens a mieux barrer que le pilote automatique. La mer s’est bien rafraichie depuis l’Atlantique, et ce matin le plancton est tres lumineux. Bientot, ce sont trois dauphins qui viennent y tracer une trajectoire phosphorescente. On peut les suivre jouer sous les vagues, zigzaguer devant l’etrave et plonger sous la coque. Par moment, le trait de sillage s’interrompt et on les apercoit sauter dans la nuit.
Tout en contemplant ce spectacle, je garde un oeil sur la guirlande de lumieres qui nous entoure, car nous sommes a nouveau sur le chemin des cargos. Ils restent groupes jusqu’au Cabo de Gata que nous doublerons tout a l’heure, puis leurs routes divergent soit pour remonter vers l’Europe, soit pour poursuivre vers la mediterranee orientale et le canal de Suez. Le vent nous fait couper leur trajectoire, j’en distingue sept sur l’horizon et j’en compte onze sur l’ecran du radar ! L’un passe a quelques centaines de metres, j’entends le ronflement de son moteur… et je me rejouis d’autant plus d’etre a la voile.
Quand les quarts sont animes le temps passe plus vite. Deja le jour se leve, les lumieres des cargos s’estompent sur le ciel qui s’eclaire. Sous le vent, des nuages lenticulaires forment comme une pile d’assiette qui annonce le relief. Bientot on distingue les contreforts sombres de la Sierra Nevada, puis derriere eux la ligne de crete couverte de neige qui rosit dans le soleil levant. Ce n’est pas sans me rappeler les cimes enneigees du Djurdjura qu’on apercoit souvent l’hiver quand le soleil se leve sur Alger. D’ailleurs, les cotes algeriennes sont a moins de 80 milles, et en ecrivant ce mail c’est la marine algerienne que j’entends appeller a la VHF pour annoncer un BMS sur les cotes de Ghazaouet, Oran et Mostaghanem.
En entamant cette cinquieme et derniere semaine, je ne peux que remercier Jean-Francois, Karine et Jacques qui m’ont permis de faire un aussi beau voyage a la voile ! Et merci aussi a Adeline qui nous fait parvenir chaque jour les commentaires du blog, pour notre plus grand plaisir. A bientot,
Guillaume, et l’equipage de Tchuda Popka
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